Quelques réflexions en attendant mon steack

Il pleut.

Il pleut tant que j’aimerai inventer un verbe nouveau pour décrire la force avec laquelle les gouttes mitraillent le sol avant d’éclater comme des chevrotines sur une peau de sanglier tandis que l’épaisse et noire couverture nuageuse n’est plus qu’une mâchoire épileptique écumant son irréfragable rage ! Ça ressemblerait presque, mais en plus vertical, à la furia de l’océan qui s’attaque aux falaises et leur mange le granit…

De ma fenêtre, le parking n’est déjà plus qu’une immense mare infranchissable, en tout cas par la camionnette blanche qui ne peut achever sa manœuvre et reste plantée en travers comme un vulgaire Toya Maru après un cyclone tropical.

Tu as déjà remarqué que plaire et pleuvoir ont le même participe passé ? Encore une de ces bizarreries magiques de la langue française qui raffole des dialogues de sourds.

— Pleut-il ?
— Plait-il ?
— Non, je te demande si, ce matin, il a plu à Paris ?
— Ha ! Cette matinée a beaucoup plu à Pâris, un peu moins à Ménélas… Hélas !
— Je… mais… arrrrghhh !

Bref.

Le restaurant qui jouxte l’hôtel est vide puisque l’orage a provisoirement coupé la route qui y mène en descellant une bouche d’égout qui déverse désormais son trop-plein d’eau sale en un bouillonnant geyser psychotique. J’ai donc l’embarras du choix quant à l’endroit où m’asseoir. Je parcours distraitement la carte que m’apporte une jeune serveuse aux grands yeux trop maquillés et me décide pour une viande rouge bien saignante. Un martini blanc (sans glaçons) pour patienter. Et pleins de questions sans réponses.

À ce stade de mon inemployabilité récurrente, il me semble qu’il me faut faire un choix entre deux grandes options.

  1. Continuer d’envoyer des CV à des recruteurs qui s’en foutent jusqu’à trouver un job de merde pour un salaire de misère dans des conditions exécrables de transport et de logement.
  2. Accepter d’être définitivement trop vieux (et/ou trop con ?) pour jamais retrouver un travail décent. Mais pour faire quoi ?

L’option 1 me fatigue. Les recruteurs ne prennent, pour la plupart, même pas le temps de te répondre. Et quand ils te répondent c’est avec une lettre type du genre « Madame, Monsieur, nous avons bien reçu votre candidature et vous remercions pour l’intérêt que vous portez à notre entreprise. » … Mais je m’en branle de ton entreprise ! À mille euros par mois, tu veux pas en plus que j’arrive tout souriant en bavant de reconnaissance sur ta belle chemise en soie ?

Bon, je ne vais pas détailler les motifs de ma colère envers les processus de recrutement, d’autres l’ont déjà fait et je t’invite à les lire, c’est à la fois poilant et désespérant… Ici, chez Mademoiselle Catherine, ou là, chez Mademoiselle Ocytocine. Il semble que les filles ont une approche plus saine de la réalité…

Reste l’option 2. J’y réfléchirai plus sérieusement pendant mon séjour à Liège (voir l’article suivant) mais je peux déjà échafauder quelques plans plus ou moins foireux et me fournir en idées dans cet abécédaire à l’usage des chômeurs en fin de droits :

  • A : Abandonner ses Ambitions et Aller s’Arrimer à un Arbre.
  • B : Boire, Bouffer, Bailler à s’en Bousiller les Babines.
  • C : Chaparder des Camemberts Coulants et des Clafoutis aux Cerises.
  • D : Décréter le Droit de Dormir du Dimanche au Dimanche.
  • E : Engueuler les Enfants, les Éviers et les Écrevisses Écarlates.
  • F : Fracturer les Fémurs et les Ferrari des Footballeurs Français.
  • G : Grimacer comme Guignol et Gnafron quand ils se Gèlent les Glandes.
  • H : Hennir comme un Hibou pour Honnir la Hache et la Haine.
  • I : Imaginer l’Ivresse Illimitée d’une Illusion Indigo.
  • J : Jouer Jumpin’ Jack Flash sur un Jembé trop Jeune.
  • L : Lire un Livre à Liège et le Lire Lentement.
  • M : Mentir au Moment de Mourir et se Marrer quand Même.
  • N : Naviguer Nonchalant sur le Net et se Nourrir la Nuit.
  • O : Observer des Orangs-outans Ouvrir un Opéra Orange.
  • P : Péter un Plomb sur le Pont d’un Paquebot Péruvien.
  • Q : Qualifier la Queue du Quêteur de Quenouille Qatarie.
  • R : Retrouver les Rues de Rome dans une Rasade de Rhum.
  • S : Savourer le Sexe Scintillant d’une Sauterelle Scandinave.
  • T : Tuer le Temps en Tuant les Trafiquants de Temps.
  • U : Uriner Uniquement sur les Ustensiles Urticants du père Ubu.
  • V : Vomir les Valeurs sur de Vieilles Vestes Violettes.
  • Z : Zoner au Zoo et Zyeuter les Zébus qui Zigzaguent.

Je te laisse compléter les lettres manquantes, j’ai un train Gare du Nord.

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