Nouvelles circularités urbaines

Je suis entré dans la salle à la fin du repas, au beau milieu d’une discussion sur l’utilité (ou non) pour les cyclistes de respecter l’arrêt aux feux rouges. Il y a deux ans, presque jour pour jour, j’écrivais ceci, de façon un peu narquoise. Mais il est tout à fait possible de se pencher sérieusement sur le sujet.

Premièrement, quelques constats. Ensuite (si j’ai le temps), quelques développements assortis de quelques pistes (plus ou moins cyclables).

Constats

  1. les villes sont en constante mutation ;
  2. ces mutations sont plus ou moins rapides selon qu’elles sont culturelles (temps long) ou forcées par les conséquences des guerres ou des catastrophes climatiques (temps court) ;
  3. les facilités de déplacements de personnes par transport collectif et/ou moyens individuels représentent une mutation particulière qui conditionne toutes les autres ;
  4. ces déplacements sont de deux types : déplacements obligatoires (école, travail, soins, démarches administratives) donc préalablement déterminés et déplacements non obligatoires donc potentiellement instantanés ;
  5. le cas d’un déplacement obligatoire non préalablement déterminé (urgence hospitalière ou fuite après braquage, notamment) est une exception et doit être traité comme telle : au cas par cas ;
  6. les déplacements déterminés (obligatoires ou non) peuvent faire l’objet d’un vaste plan de circulation qui tiendrait compte des impératifs de chaque catégorie en terme de livraison, de stationnement, de sécurité, etc ;
  7. les déplacements intantanés doivent se faire une place parmi les déplacements obligatoires sans pour autant être soumis aux mêmes contraintes (liberté de circulation, tout ça) ;
  8. la diversité des moyens de transport tant collectifs qu’individuels incitent à une réflexion transversale plutôt qu’à des mesures ciblées en fonction desdits moyens de transport ;
  9. question subsidiaire : y a-t-il encore de la place pour les piétons dans une ville de plus en plus connectée et mobile pour laquelle tout déplacement à pieds est un running ?

Développements rapides…

La mutation des villes est une forme de pléonasme. À l’image d’une plante grimpante, la ville doit se développer, s’étendre tant horizontalement que verticalement, au risque de disparaître ou de devenir la banlieue d’une voisine plus dynamique. Le développement d’une ville se caractérise par de nombreux critères qui ont tous en commun la population de cette ville et la façon qu’a cette population de se déplacer dans la ville. La sédentarisation associée aux villes et aux villages est en fait un nomadisme circonscrit aux frontières de la cité dont il détermine l’emplacement. À l’intérieur d’une ville (et même d’une maison) il faut se déplacer. De vingt centimètres ou de vingt kilomètres, un déplacement urbain est d’abord un utilitarisme : il y a toujours une raison qui contraint ou incite à se déplacer.

Jusqu’à la révolution industrielle et l’avènement de l’automobile, les déplacements urbains étaient essentiellement pédestres. Seuls quelques privilégiés roulaient carosse et monter un cheval était un signe de pouvoir réservé à une élite militaire. Aujourd’hui, la diversité des moyens de transport utilsables par tout un chacun est considérable : train, bateau, auto, vélo, chacun se déclinant en multiples formules individuelles ou collectives, avec ou sans moteur thermique ou électrique, multipliant d’autant les voies spécifiques à chaque véhicule (fleuves, canaux, rails, rues, trottoirs, pistes), chacune de ces voies pouvant être protégée (utilisable par un seul type de véhicule) ou mixte.

Tu imagines le bordel !

Bordel auquel il faut ajouter les différents codes de « bonne conduite », l’obligation faite aux uns de morceler leur trajet en alternant temps de déplacement et temps d’attente (feux, embouteillages), l’interdiction faite à d’autres d’emprunter tel parcours (les tunnels ferroviaires ou le périphérique pour les vélos et les piétons, par exemple), la variabilité à la fois générationnelle et individuelle en terme d’incivilités plus ou moins dangereuses pour soi ou pour autrui (ne pas tenir compte des feux, par exemple, comme je le fais moi-même systématiquement en tant que piéton), l’impossibilité de prévoir et donc d’exfiltrer rapidement tout véhicule en panne qui vient compliquer des plans de circulation déjà passablement ubuesques… Et on ne parlera pas des travaux de réfection desdites voies.

La problématique consiste à fluidifier tous les types de déplacements urbains en supprimant les arrêts brutaux et les redémarrages intempestifs (argument écologique inside) induits par les nombreux feux d’arrêt qui squattent le coin des rues. L’objectif principal étant de gagner du temps, le temps de déplacement étant aujourd’hui considéré comme un handicap venant altérer et le temps de travail et le temps de loisir. Fluidifier la circulation pour raccourcir le temps de déplacement revient à accélérer globalement la vitesse de ce déplacement.

D’où.

Pistes (re)cyclables…

Une première piste de réflexion pourrait alors explorer la possibilité d’une vitesse égale pour tout type de déplacement en voies mixtes (qui seraient pour le coup interdites aux piétons en dehors d’Usain Bolt).

Une deuxième pourrait n’envisager que des voies réservées pour chaque type de véhicule qui serait alors soumis à une exigence de vitesse uniforme par types de voie.

Une troisième pourrait proposer diverses formes d’alternances : tramways et bus aux heures de pointe, camions de livraison et travaux la nuit, véhicules non motorisés le reste du temps, entre autres possibilités.

Une quatrième laisserait le bordel actuel se répandre et s’auto-réguler sur le long terme en assumant pleinement les inévitables dégâts collatéraux.

Une cinquième serait d’établir…

Je te laisse y réfléchir. J’y reviendrais et de façon probablement plus méthodique un jour. Là je dois y aller, je n’ai pas encore grillé tout mon quota de feux.

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