Comme toutes les fins de cycles, les fins d’années se prêtent aux rétrospectives. Cette année, le temps de la rétrospective est aussi, pour moi, celui du manque de perspective. Et de constater que de routes en déroutes, mon bilan ressemble à Beyrouth.
Ce qui n’est pas encore tombé est en train de flancher.
Ce qui ne flanche pas n’est déjà plus qu’une ombre
qui lentement se fâne au-dessus des décombres
de ce qui fut, jadis, un homme.
Certes, j’ai fait de la route. De la route pour tenter d’estomper les déroutes. Déroutes professionnelles et déroutes personnelles. Les déroutes m’ont défait.
En ne retrouvant pas d’emploi, je n’ai pas seulement perdu quelques biens matériels (maison, voiture, meubles, CDs, guitares), j’ai perdu l’envie.
J’ai perdu de vue des gens que j’apprécie. J’ai perdu le peu de compétences que j’avais, en ne les exerçant plus. J’ai perdu la possibilité de rester accessible pour qui en avait besoin. J’ai perdu mon vieux blog et les trois autres sites qui y étaient raccordés.
J’ai perdu ce pourquoi je me levais le matin.
J’ai perdu.
Pour ma dernière nuit abritée, je suis face au miroir mais je baisse les yeux. C’est laid un loser.
Je commence aujourd’hui ma nouvelle vie de sans-abri puisque je suis arrivé au bout de mes ressources financières (je garde juste un peu de monnaie pour la route). Mais il va quand même falloir trouver quelque chose à faire, au moins pour m’occuper l’esprit.
Puisque j’aime me promener au bord de l’eau (cf cet article), j’envisage de remonter le Canal du Midi, depuis Carcassonne (où je suis actuellement) jusqu’à Toulouse. Remontée qui se fera à pied le long des chemins de halage bordés de platanes et que j’espère empruntables d’un bout à l’autre. L’avantage de longer un canal, c’est de traverser un paysage relativement plat et peu encombré de voitures. Autre avantage, cette fois dû à l’hiver, les berges ne devraient pas déborder de touristes !
Je ne sais pas trop ce que j’espère le plus retrouver en route, de mon inspiration (mes textes stagnent) ou de ma confiance (mes textes sont nuls)… Ni si je trouverais de quoi alimenter les batteries de l’ordinateur et de l’appareil photo mais où serait « l’aventure » si tout était planifié ?
Et donc — sans parler des contraintes physiologiques : manger, dormir, etc… — si tout se passe bien sur le plan énergétique et à condition de pouvoir me connecter quelque part, le prochain article devrait relater ce voyage d’à peu près 100 kilomètres qui devrait me prendre cinq ou six jours selon les conditions météorologiques.
Je ne suis pas repassé par Paris depuis plus de trois mois, et si j’excepte (mais n’oublie pas !) l’après-midi passée avec Aurélie ici-même la semaine dernière, je n’ai adressé la parole à personne depuis tout ce temps (en dehors d’un conventionnel bonjour-merci-au-revoir aux éventuels commerçants). C’est aussi de ma faute : si j’avais autre chose qu’un caractère de merde en guise de sourire, peut-être que je parlerais aux gens au lieu de changer de trottoir quand j’en aperçois dans le lointain ?
Ce qui va beaucoup me manquer durant ce périple (d’autant plus je m’en suis toujours abreuvé), c’est de pouvoir écouter de la musique. Les oiseaux, c’est vite fatigant… d’autant qu’à cette époque de l’année, la faune volatile doit être assez réduite : corneilles, moineaux, étourneaux… peut-être quelques poulets ?
En espérant que le réchauffement climatique ne soit pas une vaste blague (j’ai aussi perdu mon écharpe), je te présente, à toi et à tous ceux que tu aimes, tous mes vœux de grand bonheur ! Et garde le sourire : c’est le seul vrai cadeau qui ne s’use pas !
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