Poison d’avril et poivron d’asile

Déjà le mois d’avril. Les premiers bourgeons redonnent le sourire aux arbres et les premières notes de roses sur les cerisiers du Japon transforment les allées qui en sont bordées en podium de défilé pour couturier girly. Des merlettes se chamaillent autour d’une flaque pour humecter les feuilles embouées qui consolideront leur nid. Seule fausse note de ce printemps de chien qui vient à pas de loup, des élections navrantes où tout le monde a gagné sauf, bien sûr, les électeurs (de plus en plus rares) et la démocratie (de moins en moins vivace).

Passons vite fait sur ce simulacre qui ne fait que confirmer ce que j’ai déjà écrit (fouille le blog si tu as le temps)

Encore une fois (mais c’est systématique) les sondages se sont plantés dans les grandes largeurs. Encore une fois, la couverture médiatique de ce non-sens que représente « la montée du FN » est indigne de journalistes censés être intègres et intelligents. Ce n’est pas le FN qui monte : son nombre d’électeurs, en valeur absolue de votants, progresse en fait assez peu surtout si on considère que les électeurs extrémistes ne s’abstiennent que rarement. Ce qui monte plus vite qu’une moutarde extra-forte dans un nez pas laid, ce qui grimpe plus vite qu’une cordée himalayenne de sumos en surpoids (si un jour j’adopte une hyène, je la prénommerais Hima), c’est le désintérêt pour un système à bout de souffle conduit par des types qui ne savent toujours pas que derrière les électeurs il y a des gens, des vrais, des exclus, des déçus, des soumis, des inquiets, des angoissés, des coléreux, des à-bout-de-patience, des prêt-à-exploser.

Ce sont des hommes et des femmes qui n’emmerdent personne, qui font leur boulot correctement (pour ceux qui en ont encore un), qui ne planquent pas leur argent en Suisse, qui ne demandent ni la Lune ni la fortune et qui veulent simplement qu’on arrête de se foutre de leur gueule en empilant des règles imbéciles sur des lois inapplicables.

Ce sont des hommes et des femmes qui veulent qu’on arrête de leur parler du « trou de la Sécu ». Pour rappel, ce trou n’existe pas : la Sécu — telle qu’elle existe actuellement — doit juste être financée et n’a pas à être rentable (le « comment financer » est lui tout à fait légitime). C’est un service public et non une entreprise concurrentielle.

Ce sont des hommes et des femmes qui aimeraient bien qu’on arrête de leur parler des déficits comme on parle de monstres aux enfants, qu’on arrête de les culpabiliser sur une dette qui n’est pas la leur mais celle des banques, qu’on arrête de les prendre pour des cons avec cet objectif surréaliste des 3% (pourquoi pas 2 ou 4 ou l’âge du capitaine ?), qu’on arrête d’appliquer des règles édictées par une instance non élue mais nommée par un traité très largement rejeté par référendum en 2005. 0n peut d’ailleurs dater de cette époque la fin définitive de l’amour des français pour le jeu politicien si on se rappelle de cette photo, comme un aveu, de Hollande et Sarkozy, quasi main dans la main, en Une de Paris-Match ou de VSD, appelant à voter « Oui » à ce fameux référendum… Bandits !

Ce sont des hommes et des femmes qui veulent qu’on arrête de leur dire avec qui ne pas forniquer, avec quoi ne pas s’habiller, et comment et pourquoi, qui demandent qu’on arrête de les empoisonner aux pesticides et aux pluies acides au nom du made in France et d’une prétendue ruralité qui n’est plus qu’une ligne sur un plan comptable.

Ce sont des hommes et des femmes qui ne croient pas que les entreprises vont créer des emplois si on leur donne de nouvelles brouettées d’argent public pour encore gaver des actionnaires déjà aussi repus que des volailles landaises à l’approche de Noël !

Ce qui monte c’est un gigantesque et irréversible ras-le-bol, un monstrueux et sexy Retenez-moi ou j’casse tout !, une envie d’en découdre à nouveau (89, 48, 70, 36, 68 entre autres) puisque ce pays ne sait avancer qu’à grand coupage de têtes au yeux fous qui s’en iront rouler dans la sciure comme des étrons gras dans des toilettes sèches !

Sinon je t’avais préparé un gros poisson d’avril pêché au fil blanc. Tellement gros que j’ai failli l’avaler de travers et m’étouffer avec ses arêtes.

En vue du 1er avril, et après la branlée mémorable des copains de Flamby Scooterman aux dernières élections, j’avais commencé un article sur la nomination de Manuel Valls comme nouveau premier ministre (déjà, là, ça frisait l’invraisemblable) lequel, lecteur fidèle de mon blog qu’il aurait découvert (non pas dans le journal comme les écoutes téléphoniques) mais par l’entremise d’une note des RG, lequel Valls donc, m’aurait alors proposé un poste de conseiller en calembredaines. J’avais trouvé un début de formule du genre « gestion et amélioration des annotations dans la narration des communications à la nation ». Rien que pour corriger un tel intitulé, ce poste aurait mérité d’exister !

Et puis ce con de Hollande, qui fait rien qu’a faire ce qu’il ne faut pas faire, a nommé Valls à Matignon… J’ai aussitôt détruit le brouillon et éteint mon téléphone.

Ça devrait me laisser le temps de terminer le prochain article qui, du coup, sera plus long… Ou plus con ! Ou les deux.

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