Martine au musée

Les militants du Parti Socialiste sont des gens bizarres. Le Parti Socialiste, lui-même, est un parti étrange.

Dans quelques jours, les chefs de file et les militants de l’ex ancien-grand-parti-de-la-gauche-anticapitaliste vont se réunir en congrès afin de se désigner un (ou une) leader et, accessoirement — très accessoirement — une ligne politique.

En ce qui concerne la ligne politique, il y a peu de surprises à attendre. Une surprise serait une dénonciation unanime et sans équivoque du capitalisme d’affaire et de la globalisation financière. Mais après avoir jeté un coup d’œil (en diagonale) aux principales motions, difficile d’estimer que le PS a fait sa révolution. S’il existe quelques nuances de formes — ce qui est bien le moins quand on cherche à se différencier — aucun des quatre principaux clans ne s’oppose fondamentalement à un autre. Plutôt l’impression que chacun cherche à partager le minimum d’espace commun tout en s’efforçant, ensemble, de couvrir le spectre politique le plus large possible (en gros de Bayrou à Besancenot). Il est vrai qu’après le congrès, il faudra se rassembler et être uni (ou continuer de faire semblant)…

Le point sarcasme du jour se trouve dans les scores récoltés par chacun des protagonistes qui font de chacun d’entre eux des leaders sans pouvoir autant que d’irréductibles ennemis. Pour rappel :

  • Royal → 29% ;
  • Aubry → 25% ;
  • Delanoë → 25% ;
  • Hamon → 19%.

Après les grands combats pour la justice sociale que furent les duels fratricides Jospin contre Fabius, Rocard contre Mitterrand, Fabius contre Mauroy, Rocard contre Jospin, tout le monde contre Royal et personne pour Aubry, voilà que les mêmes (sauf Mitterrand, qui aurait adoré y être !) plus Delanoë, plus Hamon en remettent une couche pour le plus grand plaisir de Hollande et Strauss-Kahn qui (parce que désormais franc-tireurs) s’imaginent chacun président en 2012.

À l’amorce de la dernière ligne droite, Royal, en éternelle présidentiable, condamne Delanoë à rester Maire de Paris tandis qu’Hamon (le vrai vainqueur de cette histoire en fait, et avec lequel Martine devra s’allier) renvoie Aubry au Musée des Éléphants. L’attrait du jeunisme taraude actuellement la scène politique mondiale. Jeunisme d’attitude, bien sûr. Paraître jeune étant plus important que l’être réellement. Il est à craindre que l’ère des politiciens bling-bling n’en est qu’à ses débuts. La dernière démonstration de Royal est à cet égard significative. Entre les faux-jeunes et les vrais vieux elle présente seulement l’avantage de mettre un peu de couleur au milieu de tous ces costumes gris. Pour l’efficacité, de toute façon, ça ne pourra pas être pire…

Le péché originel du PS est peut-être bien dans la possibilité de ces multiples motions censées galvaniser le débat démocratique mais qui se révèlent toujours férocement réductrices et déstabilisatrices. Le futur premier secrétaire (ou la future) saura que les derniers socialistes au sein de son parti ressemblent comme deux camarades à ces lointaines carcasses évanescentes qui furent de fiers idéaux et que l’orgueil piétina et piétinera encore.

Motion signifie mouvement. Il semble que pour le PS, désormais, reculer sur place reste la seule façon d’être en mouvement.

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