Un temps de Chiens

Écrire sur la religion n’est pas facile. Écrire sur l’intégrisme religieux complique encore la tâche. Mais s’agit-il vraiment d’un livre sur la religion ?

Dehors les chiens, les infidèles par Maïa Mazaurette, Éditions Mnémos, 2008

Je ne vais pas te raconter l’histoire ni t’en faire une chronique détaillée. Sache simplement que ce livre est juste excellent et qu’il ne faut pas craindre les étiquettes fantasy et religion dont les éditeurs l’ont affublé. Achète-le, lis-le, régale-toi, point.

Ce livre est intéressant parce qu’autant le sujet (la religion) que le genre (la fantasy) ne sont que des prétextes à faire vivre des personnages. Et quand je dis vivre, il faut comprendre que ces personnages ne te quitteront plus une fois le livre terminé.

Il y a là un tour de force énorme : absolument rien (justement à cause du sujet et du genre) ne pouvait a priori me rapprocher sensuellement de ces personnages d’un autre temps dont la vie se résume à courir tous les périls pour retrouver une hypothétique mais terriblement symbolique arme de légende ! Sans oublier de joliment contribuer aux principes quasi obligatoires du genre (la quête, le dépassement de soi, le sauveur, la menace du chaos, le bien, le mal — encore que ces deux dernières notions sont très intelligemment imbriquées), Maïa a créé des personnages totalement contemporains dans leurs doutes, dans leurs émois, dans leur constante perplexité face au destin et leurs certitudes de l’instant. Des personnages complexes qui hésitent, qui se trompent, qui déçoivent, qui saignent et qui pleurent. Des personnages qui rient, qui espèrent, qui s’abandonnent… On est loin des androïdes faussement humains, des elfes faussement humains, des humains faussement humains ou des dieux parfaitement odieux.

Dans ce livre, rien ne sonne faussement. Parfois, ça résonne ossements : on s’y bat beaucoup et plutôt férocement. Mais le plus souvent, ça frissonne de haussements ! Haussements de cœur devant le cru de certaines scènes, haussements de sourcil devant la qualité descriptive des batailles, haussements des tachycardies au fur et à mesure qu’avance une intrigue impeccablement ciselée, haussement de talent surtout, celui dans lequel l’auteure a pris bien soin d’enrober chaque page.

Tu auras compris que ce livre est quasiment impossible à refermer avant la fin. 430 pages. Tu es prévenue !

***

Maïa Mazaurette est l’auteure de nombreux livres sur la sexualité (notamment le très instructif « La revanche du Clitoris », de scénarios pour la série « Péchés mignons » dessinés par Arthur de Pins, de plein d’autres choses encore tout en continuant inlassablement à entretenir (première marche sur l’escalier de sa gloire) son blog Sexactu à la fois pionnier et référence du genre en France.

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