Vieux cons !

Ils sont partout ! Même dans mon miroir !

Mais surtout à côté de toi quand tu sors ton téléphone portable et qu’ils te balancent sans te regarder un mais comment qu’on f’sait avant ? qui sent fort l’acariâtre en peau de boudin…

En tout début d’après-midi, ce jour d’hui, je m’installe tranquille dans un café du XIVe arrondissement. Je commnande une bière et une connerie à grignoter. Vas-y, fais-voir la carte… mmouais… allez, un hot-dog avec des frites… nan, pas de ketchup, vandale  !

Le temps que le plat arrive, j’attaque mon verre et après l’avoir reposé délicatement sur la zone d’ombre de la table — oui, il y avait du soleil à Paris aujourd’hui ! un 16 juillet ! incroyable ! — je sors mon téléphone portable pour rédiger un message à une amie. C’est alors que le vieillard cacochyme assis à côté de moi se met soudain à tousser dru et marmonne, entre ses vielles dents jaunies par soixante années à fumer du papier maïs, la phrase déjà écrite ci-dessus mais, comme personne ne suit, je te la copie-colle ci-contre en rajoutant juste une majuscule parce que bon, l’orthographe c’est sérieux : Mais comment qu’on f’sait avant ?

T’as vu ? Je suis resté calme. Mais je n’en ai pas pensé moins pour autant et comme ce vieux con ne méritait pas ce qui suit, je te le confie à toi (ce que je pense, hein, pas le vieux).

Mais comment faisait-on avant ?
Mais avant quoi ?
Avant la fourchette ? Avant le PQ ?
Avant les lunettes, le métro, le Sauvignon ?
Avant les Tractions Avant ?
Avant les calendriers de l’avent ?
Avant les paravents, les auvents, les éléphants roses et les idées noires ?

Si les vieux cons n’existaient pas, il ne faudrait surtout pas les inventer ! Ils n’ont plus de rêves, plus d’espoirs, plus de sourires, plus de questions. Ils se plaisent à éterniser leur inutilité et répandent leur aigreur sur le printemps qui naît. Ils ont oublié leur mémoire et se mentent en se croyant vivants. Ils font des croche-pattes aux chiens et marchent sur la queue des enfants (ou l’inverse, je n’ai pas pris le temps de bien regarder). Ils sont laids. Ils sont vieux. Ils sont cons !

Je rêve d’une île lointaine à l’abri des vieux cons. Et le premier navigateur au large surpris à hurler Terre ! Terre !, je le ferai taire ! Je le submergerai d’une vague à l’âme d’acier, le hacherai menu puis le servirai, goulûment enrobé de plancton, aux baleines vivrières et aux requins-marteaux-piqueurs-carreaux-trèfles !

Sur cette île, il n’y aurait enfin que des amis, du rhum, de la musique et des chiens… Ce ne serait peut-être pas le paradis, mais ce serait beaucoup mieux !

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